St Laurent, dans Le Monde du 25 avril 2019
A Saint-Laurent, la centrale nucléaire, « j’en verrai jamais le bout »
Alors que le débat grandit sur le destin des déchets radioactifs, le bourg du Loir-et-Cher s’inquiète de la présence de l’atome, même s’il lui doit sa prospérité.
Gilles Perrin, 64 ans, promène sa bineuse mécanique sous les volutes de vapeur des tours de refroidissement. Ses champs s’étalent autour de la centrale nucléaire EDF, à peine séparés d’elle par la petite base nautique de son comité d’entreprise. Cet hiver, l’électricien a demandé à M. Perrin de lui céder 56 hectares, ainsi qu’à cinq autres agriculteurs, « pour augmenter sa réserve foncière de 115 hectares », mais tout en restant flou sur ses intentions. « Est-ce pour y construire un parc solaire, assurer le démantèlement de quatre réacteurs, installer de futurs EPR, enfouir des déchets ou juste pour maintenir les antinucléaires à distance ? On ne nous dit rien », selon M. Perrin.
Alors il a répondu non, et s’en explique : « Mon fils Florian a 23 ans, il travaille à la ferme depuis deux ans, aime son métier et compte bien l’exercer toute sa vie. En 1963, quand EDF est arrivé, son grand-père n’avait pas eu le choix. Il a fallu vendre beaucoup de terres au nom de l’intérêt public et accueillir sur les autres d’immenses pylônes de lignes à haute tension, sans toucher de rente bien sûr. Maintenant, ça suffit, on entre en résistance. »
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