Le lobby nucléaire à la manœuvre auprès de la Commission Européenne pour être reconnu "vert"
Le nucléaire, éligible pour les investissements verts ? Une aberration environnementale et climatique, reposant sur un raisonnement cynique et malhonnête !
Communiqué du 2 avril 2021 du réseau.
Le Réseau “Sortir du nucléaire“ dénonce les tentatives de la France et du lobby industriel du nucléaire pour inclure cette technologie dans le projet de taxonomie (classification) européenne censé définir les investissements « verts ».
En faisant la promotion du nucléaire au niveau européen, la France sabote la lutte contre le changement climatique
Alors que le nucléaire est jusqu’ici exclu des investissements « verts » en raison de ses impacts environnementaux, la France a recours aux pires stratégies pour créer un rapport de force favorisant son inclusion. Déjà, lors du Conseil européen de décembre 2019, elle n’avait pas hésité à s’allier avec des États grands défenseurs du charbon pour prendre la défense du nucléaire. Elle se montre maintenant ouverte à rendre le gaz fossile éligible aux investissements « verts », comme le souhaite la Hongrie de Viktor Orban, dans l’espoir que le nucléaire y trouve à son tour sa place [1].
Une telle attitude revient à vider de son sens ce mécanisme censé éviter le greenwashing. Elle illustre la duplicité et l’hypocrisie de la France, qui se pose en championne du climat sur la scène internationale tout en se montrant complaisante avec des États défenseurs des énergies fossiles – et par ailleurs fort peu exemplaires du point de vue de la démocratie et du respect des droits humains, tels que la Hongrie et la Pologne. Cette position est d’autant plus insupportable au regard du peu d’ambition déployée par le gouvernement français pour élaborer une loi climat digne de ce nom.
Le lobby nucléaire à la manœuvre auprès de la Commission Européenne
Nous dénonçons également le travail de sape mené par le lobby européen de l’atome. Mécontent des précédents travaux de la Commission européenne, pour qui les nuisances entraînées par le nucléaire prohibaient son inclusion dans les investissements verts, celui-ci a poussé pour la rédaction d’un autre rapport plus favorable (voir le texte dévoilé par Politico). Confié au Joint Research Center, organisme historiquement lié à Euratom et proche du lobby Foratom [2], ce nouveau rapport parvient à des conclusions surréalistes : le nucléaire ne représenterait « pas plus de danger pour la santé humaine » que les énergies renouvelables ! Sur un mode incantatoire, il martèle que le nucléaire ne comporterait pas d’impact environnemental significatif, tout étant bien géré et le problème des déchets étant réglé. Un constat qui n’existe que dans la tête des nucléocrates...
Présenter comme non nocive une technologie polluante, dangereuse, devant faire l’objet d’une surveillance permanente et productrice de déchets qui resteront dangereux pour des durées dépassant le temps humain, voilà qui relève d’une profonde malhonnêteté intellectuelle. Il est inacceptable que le lobby nucléaire puisse ainsi dicter ses conclusions et influer sur la politique européenne.
Non, le nucléaire ne sauvera pas le climat !
Cette stratégie visant à promouvoir le nucléaire comme solution face au changement climatique afin de le faire bénéficier de nouvelles sources de financements est révélatrice des grandes difficultés d’une filière qui ne survit pourtant déjà que grâce à un important soutien public. Lourdement endettée, en difficultés pour assurer la gestion de ses déchets et le démantèlement de ses installations, EDF est incapable de financer elle-même la construction des six nouveaux réacteurs qu’elle souhaite voir sortir de terre dans les prochaines décennies.
Faire bénéficier le nucléaire de la manne financière du Green Deal européen serait pourtant une absurdité qui porterait lourdement préjudice à la lutte pour la réduction de nos émissions. Vulnérable aux aléas climatiques extrêmes, cette énergie est également hors jeu face à l’urgence. Il est impossible de réduire drastiquement nos émissions en moins d’une décennie, comme le recommande le GIEC, en misant sur une technologie chère, lente à se développer et sujette à d’importants retards, comme l’illustre le chantier de l’EPR de Flamanville. Tout euro fléché vers le nucléaire ferait alors cruellement défaut au développement de vraies solutions et à la nécessaire transformation de nos systèmes de production et de consommation.